Gil Blas - Wednesday, May 1, 1895

Londres, 29 avril. --Les dépositions des témoins dans l'affaire Oscar Wilde ont encore occupé toute la journée d'aujourd'hui. Le ministère public a achevé la partie qui incombe à l'accusation.

On n'est pas certain maintenant que l'affaire puisse être terminée demain.

LOUIS ROZIER

La Petite République - Wednesday, May 1, 1895

Londres, 29 avril.

L'affaire Oscar Wilde et Taylor est reprise ce matin devant la cour d’assises. Le public est un peu moins nombreux qu’hier.

Sir Eward Clarke, avocat de Wilde, interroge le témoin Alfred Wood.

Ce témoin est celui qui fit chanter Wilde jusqu’à concurrence de 30 ou 35 livres sterling en lui vendant des lettres écrites par Wilde à lord Alfred Douglas.

Ce qu’il y a de curieux dans cette affaire, c’est qu’il y a toujours des noms qu’on évite de mentionner.

Ainsi Wood déclare avoir été présenté à Wilde par un monsieur dont le nom n’a pas paru au procès; et ce nom, on ne le donne pas.

Atkins, un autre témoin, dit également avoir été présenté à Taylor par un monsieur dont le nom n’est pas prononcé ; c'est ensuite Taylor qui le présenta à Wilde au café de Florence. Là, on fit un excellent dîner.

C’est Atkins que Wilde emmena à Paris. Wilde lui défenuit d’aller au Moulin-Rouge ; mais Atkins s’empressa de désobéir.

«N’allez pas dans ces endroits; les femmes vous perdront, » avait coutume de lui dire Oscar Wilde.

Plus tard, Wilde lui recommanda de ne pas raconter qu'il l’avait emmené à Paris.

Atkins se rappelle avoir connu Mavor, un autre membre de l’abominable confrérie. On appelait Mavor «Jenny».

— Connaissez-vous la personne dont le nom est écrit sur ce papier? demande sir Edward Clarke à Atkins en lui tendant un morceau de papier. — Non, répond Atkins. D. Vous avez connu un monsieur de ce nom à Birmingham ? R. Non.

L’interrogatoire continue ; il porte sur des faits de chantage.

Ces malheureux semblent s'être fait d’ailleurs une seconde spécialité du chantage. Ils allaient même par grosses sommes. Ou parle de 5,000 francs obtenus d’une première victime.

Une somme plus considérable aurait été extorquée à deux Américains à l'hôtel Victoria. Enfin, une somme de 13,500 francs aurait été extorquée à un comte étranger venu sur son yacht à Scarborough.

Naturellement, Atkins déclare n’être pour rien dans toutes ces affaires.

Mavor est ensuite interrogé; c’est lui que le témoin précédent appelait Jenny. Comme ce nom l'indique, ces pratiques honteuses étaient chez Mavor une profession.

Wilde ne manqua pas de lui offrir le traditionnel porte-cigarettes en argent; Mavor n’en déclare pas moins que rien d’indécent ne s’est passé entre lui et Wilde, auquel il fut présenté par un monsieur d’un rang social très élevé, dans un diner donné par ce monsieur dont le nom est gardé secret.

Un autre témoin, Shelley, demande par grâce qu’on lui évite la honte d’un nouvel examen et qu’on lise ses précédentes déclarations. Mais le ministère public est inflexible et lui fait raconter tous les faits par le menu.

Le malheureux s’excuse lui-même d’avoir été un fou.

Londres. 25 avril.

On entend les dépositions de M. Migge, masseur au Savoy-Hôtel, et de Marguerite Cottar, femme de chambre au même hôtel à l'époque où Wilde y habitait, qui donnent les détails les plus précis sur les pratiques aux quelles se livrait Oscar Wilde et sur les scènes qui se passaient dans la chambre qu'il occupait.

Dans un contre-interrogatoire Marguerite Cottar déclare qu’elle ne connaissait pas Wilde avant sa venue au Savoy-Hôtel,où elle resta un mois.

Miss Derkins, femme de charge, confidente du témoin précédent, vient confirmer ces déclarations.

On dépose des documents originaux trouvés dans une caisse à chapeaux chez Taylor.

Il y a un chèque pour Wood, plusieurs chèques le 30 shillings et du 2 livres au nom de Mavor, divers télégrammes donnant des rendez-vous, etc.

Londres, 29 avril.

L’affaire Oscar Wilde ed renvoyée à demain.

Le ministère public a achevé la partie qui incombe à l’accusation.

On n'est pas certain maintenant que l'affaire puisse être terminée demain.

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