La Patrie - Sunday, May 26, 1895

Le procès d’Oscar Wilde a repris, hier matin, devant la cour d’assises.

L’audience a été consacrée à la défense de l’accusé, présentée par l'avocat sir Edward Clarke.

Après le plaidoyer de son avocat, Oscar Wilde a été appelé, suivant l'usage anglais, à témoigner. Dans son interrogatoire, Oscar Wilde a nié très énergiquement toutes les accusations portées contre lui.

Les lettres adressées par Oscar Wilde à lord Alfred Douglas ont été l'objet de plusieurs questions.

Le ministère public, relevant dans une de ces lettres la phrase suivante : « Vos lèvres purpurines sont faites pour la musique des chants et la folie des baisers», demande à l’accusé si c’est là une manière décente d’écrire à un jeune homme.

— C’est une chose littéraire, répond Wilde. C’est comme un sonnet de Shakespeare ; c’est une façon fantasque et extravagante d’écrire à un jeune homme.

Pendant toute la durée de cet interrogatoire, le marquis de Queensberry se tenait debout, bien en vue de tous, écoutant avec attention les déclarations de Wilde.

Journal des débats politiques et littéraires - Thursday, May 23, 1895

Londres, le 22 mai.

L'affaire Oscar Wilde a commencé ce matin devant la Cour d'assises.

L'accusé entre à dix heures et demie. Il est beaucoup plus pâle qu'hier. On dirait que le résultat du procès Taylor l'a sérieusement affecté.

Le ministère public développe l'accusation avec une grande précision.

Le premier témoin appelé est Shelley. Il raconte les faits qui sont déjà connus.

Pendant qu'il parle, le marquis de Queensberry entre dans la salle. Sa figure ne porte aucune trace d'émotion, malgré sa récente rencontre avec son fils.

Alfred Wood renouvelle son précédent témoignage.

Nous avons annoncé hier soir quelle a été l'issue, devant les tribunaux, de la rixe qui a eu lieu sur la voie publique entre le marquis de Queensberry et son fils, lord Douglas de Hawick. L'agence Havas nous communique sur cette amusante aventure les détails complémentaires suivants:

Londres, le 22 mai.

Le marquis de Queensberry et son fils aîné, lord Douglas de Hawick, ont comparu aujourd'hui devant le tribunal de police de Marlborough-Street, inculpés tous deux d'avoir causé, hier, des désordres sur la voie publique.

Lord Douglas portait sur sa figure quelques marques de la colère paternelle.

Le père et le fils, quoique comparaissant ensemble, sont restés d'une froideur de glace l'un envers l'autre.

Après la déposition d'un des policemen qui les ont arrêtés, le marquis de Queensberry raconte à son tour qu'il n'a frappé son fils que pour se défendre.

L'avocat de lord Douglas produit un paquet de lettres que le marquis aurait écrites à son fils, et dans lesquelles il a relevé des accusations dégradantes contre les deux fils du marquis, contre lady Douglas et d'autres membres de la famille.

Lord Douglas avait demandé à son père de cesser l'envoi de ces lettres; mais le marquis n'avait pas tenu compte de cette demande et était allé à la maison de son fils où il avait fait du scandale.

Le marquis de Queensberry déclare que ses lettres n'étaient nullement indécentes. Il dit qu'il est allé à la maison de son fils, parce qu'on lui avait dit que Oscar Wilde habitait avec lui. Il ne voulut quitter la maison que lorsque lady Douglas lui donna sa parole d'honneur que son second fils n'était pas dans la maison.

Le juge n'a pas voulu considérer la question de savoir qui a commencé la querelle et il a condamné le père et le fils à fournir caution de 12,500 fr. chacun pour six mois, afin qu'ils se tiennent tranquilles.

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