Le Peuple - Sunday, April 28, 1895

Le procès Oscar Wilde. – Le procès définitif du poète Oscar Wilde s'est ouvert vendredi matin, devant la Central Criminal Court.

Le juge Charles avec ses assesseurs, assistés d'un jury, préside les débats. Alfred Taylor, l'ami, ou, si on veut, le complice d'Oscar Wilde, est à côté de lui au banc des prévenus.

Oscar Wilde, qui a légèrement maigri en prison, a une attitude de parfaite indifférence, vraie ou affectée.

Sir Edward Clarke, défenseur d'Oscar Wilde, soulève d'abord une question préjudicielle. Il invite le ministère public à spécifier, très exactement, la nature de l'accusation et le texte des lois pénales en vertu desquelles son client est poursuivi.

La cour, après avoir entendu le ministère public, décide finalement que tous les chefs d'accusation seront compris dans celui de misdemeanour (inconduite).

Les deux prévenus déclarent alors plaider non coupables. (On sait que d'après la loi anglaise, la pénalité est plus ou moins forte, selon que le prévenu a nié, en se déclarant non coupable, ou avoué, en plaidant coupable.)

M. Gill, conseiller de la Reine, développe ensuite l'accusation au sujet des relations de Wilde et de Parker; il entre dans des détails que nous ne pouvons reproduire.

Le témoin Charles Parker, une des « victimes » de Wilde, raconte qu'il a été mis par le prévenu Taylor, en rapport avec le poète. Ils dînèrent tous les trois au Savoy Hotel.

L'audience continue.

De interrogatoire de Parker, plus fertile encore en détails nauséabonds que la déposition faite par ce même témoin devant le juge d'instruction, il résulte que les nommés Wood et Allan, entre les mains desquels étaient tombées les lettres de Wilde à lord Alfred Douglas et des preuves des relations du poètes avec d'autres individus, se sont fait payer leur silence 400 livres sterling (10,000 francs).

On pourvoyait aux vices de l'auteur d'Un mari idéal et on les exploitait ensuite par le chantage. Le témoin Parker lui-même reconnaît avoir touché une part de l'argent.

Dans son contre interrogatoire, Parker déclare que Taylor le présenta à lord Alfred Douglas, fils du marquis de Queensberry. Cette déposition est très défavorable à lord Alfred.

On entend ensuite Mme Grant, Mme Rumsby et Mme Bancroft, qui louaient des appartements à Taylor et déclarent que Wilde y venait souvent.

Au début de l'audience de samedi matin, le témoin Wood, longuement interrogé, a reconnu avoir touché 175 livres (4,375 francs) comme part du produit de ses actes de chantage à l'égard du poète Wilde. Wood affirme que ses moeurs étaient restées à l'abri de tout reproche, jusqu'à sa rencontre avec le poète.

On entend ensuite le témoin Atkin qui déclare avoir diné au restaurant avec Wilde et lord Alfred Douglas, fils du marquis de Queensberry.

Il prétend que Wilde était au mieux avec un des garçons du restaurant. Le poète conduisit Atkins à Paris, lui fit des présents en argent, lui donna un étui à cigarettes, etc. Le poète lui enjoignit à cette époque de ne pas parler de leur voyage.

Le témoin qui est bookmaker et qui opère aux courses sous le nom de "Fred.Donny", nie s'être promené dans les rues de Londres sous un déguisement féminin.

L'audience continue.

La Gazette de Guernesey - Saturday, May 4, 1895

Le procès définitif du poète Oscar Wilde s'est ouvert, Vendredi matin devant la Central Criminal Court. Le juge Charles avec ses assesseurs, assistés d'un jury, préside les débats. Alfred Taylor, l'ami, ou, si on veut, le complice d'Oscar Wilde, est à côté de lui au banc des prévenus. Oscar Wilde, qui a légèrement maigri en prison, a une attitude de parfaite indifférence, vraie ou affectée. Sir Edward Clarke, défenseur d'Oscar Wilde, soulève d'abord une question préjudicielle. Il invite le ministère public à spécifier, très exactement, la nature de l'accusation et le texte des lois pénales en vertu desquelles son client est poursuivi. La cour, après avoir entendu le ministère public, décide finalement que tous les chefs d'accusation seront compris dans celui de misdemeanour (inconduite). Les deux prévenus déclarent alors plaider non coupables. (On sait que d'après la loi anglaise, la pénalité est plus ou moins forte, selon que le prévenu a nié, en se déclarant non coupable, ou avoué, en plaidant coupable.) M. Gill, conseiller de la Reine, développe ensuite l'accusation au sujet des relations de Wilde et de Parker; il entre dans des détails que nous ne pouvons reproduire. Le témoin Charles Parker, une des "victimes" de Wilde, raconte qu'il a été mis par le prévenu Taylor, en rapport avec le poète. Ils dînèrent tous les trois au Savoy Hotel. De cet interrogatoire de Parker, plus fertile encore en détails nauséabonds que la déposition faite par ce même témoin devant le juge d'instruction, il résulte que les nommés Wood et Allan, entre les mains desquels étaient tombées les lettres de Wilde à lord Alfred Douglas et des preuves des relations du poètes avec d'autres individus, se sont fait payer leur science 400 livres sterling, (10,000 francs). On pourvoyait aux vices de l'auteur d'Un mari idéal et on les exploitait ensuite par le chantage. Le témoin Parker lui-même reconnaît avoir touché une part de l'argent. L'audience continue.

Au moment même où se plaidait à Londres cette lamentable affaire, lord Sholto Douglas qui est indirectement impliqué, on le sait, dans le procès faisait parler de lui de manière sensationnelle en Amérique.

Lord Sholto Douglas, également fils du marquis de Queensberry, vient d'être, en effet, arrêté à Bakersfield, en Californie. La raison avouée de cette arrestation, qui a fait énormément de bruit, est que le jeune lord serait atteint d'aliénation mentale ; mais s'il faut en croire les journaux de New York qui racontent le fait, on aurait, en réalité, arrêté lord Sholto pour l'empêcher d'épouser une jeune femme dont il était tombé éperdûment amoureux.

Lord Sholto Douglas a vingt-trois ans. Il avait débarqué à Bakersfield il y a quelques mois pour prendre la direction d'une exploitation fruitière qui lui avait été laissée par sa mère.

Jeudi dernier, le fils du marquis de Queensberry se procura la licence nécessaire à son mariage avec une fille d'hôtel nommée Loretta Addis, récemment arrivée de San-Francisco où elle était employée dans un café concert.

Loretta Addis est d'une grande beauté; elle paraissait partager la grande passion de lord Sholto. Ceclui-ci ne faisait aucun mystère de ses intentions matrimoniales. A peine se fut-il procuré la licence qu'un de ses amis, M. Burwester, alla trouver le magistrat et lui affirma que lord Sholto Douglas était atteint de folie et, par conséquent, inconscient de ses actes. C'est alors que fut décerné le mandad d'amener. Le jeune lord a été incarcéré et mis en observation. Il a, sur les conseils de son avocat, consenti à se prêter à un examen médical.

Comme nous le disons plus haut, cette arrestation a produit une grande sensation et provoqué les commentaires les plus invraisemblables.

Des gens qui connaissent la famille du marquis de Queensberry affirment que jamais lord Sholto n'a donné le moindre signe d'aliénation mentale.

L'affaire en est là.

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