Le Gaulois - Saturday, April 27, 1895

C'est hier qu'ont commencé, devant la cour criminelle de Londres, les débats définitifs de cette triste affaire, la décision du tribunal d'instruction de Bow-Street ayant donné au jury la tâche d'apprécier les actes d'immoralité reprochés a M. Oscar Wilde et à son complice Taylor. Une foule nombreuse assiégeait les abords de la cour et, les portes a peine ouvertes, a essayé d'envahir la salle d'audience. Il n'a fallu rien moins que la sévérité d'une consigne exceptionnelle pour empêcher un véritable scandale de se produire. Des cartes spéciales avaient été distribuées, et les privilégiés seuls ont pu assister aux débats.

MM. Horace Avory et Gill remplissaient l'office de ministère public. M. Oscar Wilde était assisté de sir Edward Clarke et de deux autres avocats; M. Taylor, de deux défenseurs.

La plus grande partie de cette première audience a été consacrée à la lecture de l'acte d'accusation, qui ne contient pas moins de vingt-cinq faits délictueux relevés à la charge des accusés.

M. Oscar Wilde, qui est fort maigri et très changé, a écouté cette lecture dans une attitude des plus abattues; Taylor, lui, semblait moins ému.

M. Gill a exposé l'accusation, et les mêmes témoins, dont nous avons déjà reproduit en partie les explications, lors de leur comparution devant le tribunal de Bow-Street, ont été appelés à déposer devant la cour mais le président a exigé d'eux la relation de détails tellement précis qu'il nous est véritablement impossible d'y faire la moindre allusion. L'audience a été renvoyée à aujourd'hui, pour la suite des débats.

Le Quotidien illustré - Sunday, April 28, 1895

Londres.-- L'affaire d'Oscar Wilde et de Taylor a commencé hier devant la Cour d'assises.

Aussitôt que les portes de la Cour sont ouvertes, une foule énorme de curieux se précipite pour envahir la salle; mais on n'entre que sur la présentation de cartes spéclales.

M. Horace Avory et M. Gill remplissent l'office de Ministère public. Wilde est défendu par sir Edward Clarke et deux autres avocats. Taylor a deux défenseurs.

Oscar Wilde paraît plus amaigri encore que la dernière fois que nous l'avons vu à Bow-Street. Il porte les cheveux plus courts. Il écoute la lecture de l'acte d'accusation mais paraît d'abord assez indifférent.

Sir Edward Clarke soulève au début quelques points de droit. Ensuite M. Gill commence à développer les accusations qui pèsent sur Oscar Wilde et sur Taylor. Il entre dans les détails que l'on connait déjà.

Les faits sur lesquels se base l'accusation sont au nombre de 25.

A mesure que M. Gill parle, Oscar Wilde paraît de plus en plus abattu; il cache sa flgure dans ses mains. Taylor semble beaucoup moins ému.

On appelle les témoins qui ont déjà défilé à Bow Street. Ils racontent de nouveau les répugnantes histoires que nous avons entendues plusieurs fois déjà, mais, sur l'ordre du juge et sur la demande du ministère public, ils entrent dans tous lés détails des faits sadiques auxquels Wilde se livrait.

Le témoin Parker, dans un long interrogatoire, avoue qu'il a reçu 750 francs de deux individus qui ont extorqué de 8 à 10,000 francs à un personnage avec lequel, lui Parker, avait commis dès actes d'indécence.

Les interrogatoires continuent.

Les avocats des accusés cherchent à faire tomber les témoins dans des contradictions et à montrer qu'ils ne méritent aucune confiance; mais les faits n'en restent pas moins accablants pour les accusés.

L'affaire est ajournée à aujourd'hui.

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