La Lanterne - Saturday, April 6, 1895

Londres, 4 avril. -- Les débats de l'affaire Oscar Wilde contre le marquis de Queensbury ont continué aujourd'hui.

L'interrogatoire s'est poursuivi encore pendant cette audience, roulant toujours sur des sujets extrêmement scabreux.

M. O. Wilde, questionné sur ses relations avec un certain nombre de jeunes gens de vingt ans environ, jeunes gens qu'il emmenait avec lui en voyage, auxquels il offrait à souper dans des cabinets particuliers, et qu'il gratifiait généralement ensuite d'un porte-cigare en argent, se contente de répondre qu il aimait leur société parce qu'ils étaient jeunes, et qu'il détestait celle des vieux; mais, ajoute-t-il, on ne peut lui reprocher aucun acte répréhensible.

Tout à coup une stupéfaction véritable s'empare de 1'assistance quand elle entend la lecture de passages de lettres dans lesquelles le nom d'un haut personnage, membre de l'aristocratie, est prononcé.

Le conseil du marquis de Queensbury a commencé ensuite la défense de son client et l'audience a été renvoyée à demain.

Ce procès passionne l'opinon publique et les journaux, par les détails qu'ils en donnent, ne contribuent pas peu à augmenter encore l'émotion qu'il excite par lui-même.

Londres, 4 avril. -- Le public a été fortement impressionné par la lecture d'une lettre du marquis de Queensbury au père de sa première femme. Cette lettre contenait cette phrase:

« Il (Oscar Wilde) a montré qu'il était un làche et le dernier de ces misérables du type de lord Rosebery. »

La lecture d'une autre lettre du marquis mentionnait également le nom du premier ministre.

Ces deux citations donnent lieu à toute sorte de commentaires.

Le Siècle - Wednesday, May 1, 1895

LONDRES, 30 avril. -- Les débats de l'affaire Oscar Wilde et Taylor ont continué aujourd'hui.

Les avocats défenseurs des accusés ont commencé leurs plaidoiries.

Sir Edward Clarke, pour Oscar Wilde, repousse toutes les accusations qui pèsent sur son client, il se plaint amèrement de la presse dont les commentaires ont causé à ce dernier un préjudice considérable.

Oscar Wilde déclare lui-même qu'il n'y a absolument rien de vrai dans toutes les allégations qu'on a formulées contre lui.

L'accusé, sur une question qui lui était posée, a fait les déclarations suivantes:

« Oui, dans cette pièce de vers, il s'agit d'amour; mais c'est un amour qui n'est pas compris dans ce siècle! C'est l'amour de David pour Jonathan. C'est l'amour que Platon dans sa philosophie décrit comme le commencement de la sagesse. C'est une affection spirituelle et profonde, aussi pure qu'elle est parfaite. C'est elle qui donne naissance au plus grands chefs-d'oeuvre de l'art. »

« Un semblable amour est bien mal compris aujourd'hui! C'est une affection intellectuelle entre deux hommes, l'un plus âgé, l'autre plus jeune, le plus âgé possédant l'expérience du monde, le plus jeune renfermant en lui la joie, l'espérance, le charme de la vie. C'est là une chose, je le répète, que notre époque ne comprend pas. Elle est le but des risées de tous et conduit ses adeptes au pilori! »

L'accusé Taylor est interrogé à son tour; il nie tous les faits qui lui sont reprochés.

La suite des débats est renvoyée à demain.

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