Le Petit moniteur universel - Friday, May 3, 1895

Londres, 1 er mai.

Les débats de l’affaire Oscar Wilde et Taylor ont été repris devant la cour criminelle centrale.

Oscar Wilde a opposé de formelles dénégations aux dépositions des témoins produits contre lui.

Après Wilde, Taylor est appelé à témoigner comme l’avait fait son co-accusé. Il prête serment. On remarque qu’il est nerveux.

Interrogé par son propre défenseur, il répond qu’il est âgé de trente-cinq ans. Son père mourut en 1874 et lui laissa 1,100,000 francs de fortune. Il vécut alors dans les plaisirs.

Après ces interrogatoires, sir Edward Clarke a repris la parole en faveur de Wilde. Sa plaidoirie éloquente a soulevé les applaudissements de l’assistance.

M. Yrain, avocat de Taylor, a ensuite présenté la défense de son client.

Le reste de audience a été consacré à la réplique du ministère public.

On croit que le verdict sera prononcé aujourd'hui.

Londres, 1 er mai.

Le juge résume l’affaire.

Le jury est entré ensuite dans la salle de ses délibérations. Après quatre heures de délibération, le jury a déclaré ne pouvoir se mettre d’accord.

MM. Wilde et Taylor ne sont donc pas condamnés.

La France - Thursday, May 2, 1895

De Londres, 30 avril :

Les débats de l'affaire Oscar Wilde et Taylor ont été repris ce matin devant la cour criminelle centrale.

M. Gill, un des membres du ministère public, déclare que, pour permettre aux accusés d’être entendus comme témoins, il retire l’accusation d’avoir agi de concert en vue de procurer des personnes pour la perpétration d’actes immoraux.

Sir Edward Clarke commence la défense de son client. Il soutient que les ouvrages de M. Oscar Wilde ne mentionnent aucun personnage ayant commis l’abominable crime reproché à leur auteur.

Oscar Wilde est alors appelé comme témoin et admis à prêter serment.

Le défenseur lui demande :

— Y a-t-il la moindre chose qui soit vraie dans les allégations que vous auriez commis des actes d’indécence?

L’accusé répond qu'il n’y a absolument rien de vrai dans aucune de ces allégations.

M. Gill, ministère public, procède à un contre-interrogatoire de Wilde.

Parlant d’un sonnet de lord Alfred Douglas, dans lequel il est question d’amour, M. Gill demande : « De quelle espèce d’amour s’agissait-il dans cette pièce de vers ? »

Wilde, à cette question, reprend tout son aplomb et répond avec chaleur :

C’est un amour qui n’est pas compris dans ce siècle ! C’est l’amour de David pour Jonathan. C’est l’amour que Platon, dans sa philosophie, décrit comme le commencement de la sagesse. C’est une affection spirituelle et profonde, aussi pure qu’elle est parfaite. C’est elle qui donne naissance aux plus grands chefs-d’œuvre de l’art. Un semblable amour est bien mal compris aujourd’hui ! C’est une affection intellectuelle entre deux hommes, l’un plus âgé, l’autre plus jeune ; le plus âgé possédant l’expérience du monde, le plus jeune renfermant en lui la joie, l’espérance, le charme de la vie. C’est là une chose, je le répète, que notre époque ne comprend pas. Elle est le but des risées de tous et conduit ses adeptes au pilori !

A peine Wilde a-t-il terminé cette longue réponse, que des applaudissements éclatent dans la galerie où se trouve le public.

M. Gill poursuit son interrogatoire.

Wilde nie tout.

A propos d’Alphonse Tonway, de Mavor et d’Atkins, que l’association lui donne comme complices, la question suivante est posée à l’accusé :

D. — Eprouviez-vous pour ces jeunes gens le genre d’affection que vous avez décrit ?

— Non certes, répond Wilde.

Après Wilde, Taylor est appelé à témoigner :

Il est faux, dit-il, qu’il célébré une cérémonie de mariage avec lui. Il n’avait pas de vêtements de femme chez lui ; il avait un costume oriental. Il avait une perruque et des bas de femme. Il fut présenté aux frères Parker par un monsieur dans Piccadilly.

Il ignorait ce qu’ils étaient. Jamais il ne leur suggéra l’idée de gagner de l’argent comme ils l’ont dit. Il leur donna son adresse, les invitant à venir le voir chez lui, où il recevait beaucoup de jeunes gens.

Il présenta les Parker à Wilde sans avoir rien découvert sur ces jeunes gens.

Cet interrogatoire termine le procès proprement dit. Sir Edward Clarke prend de nouveau la parole. Son discours est un magnifique morceau d’éloquence. Les applaudissements éclatent quand il a terminé.

M. Train, avocat de Taylor, présente la défense de ce dernier.

Le procès finira demain.

Highlighted DifferencesNot significantly similar