Le Rappel - Friday, September 27, 1895

Oscar Wilde a été extrait de la prison de Wandsworth où il purge sa peine ; dans la nuit de lundi, il a été conduit à Newgate où il a passé, la nuit de mardi - matin, à cinq heures une voiture circulaire le transportait à Carrey Street où se trouve la cour des banqueroutes.

La salle est comble dès l'ouverture de l'audience.

A l'appel de l'affaire Oscar Wilde, M. J. P. Grain, soliieitor, demande la remise.

— La situation du condamné, dit-il, est maintenant parfaitement établie. Oscar Wilde doit exactement 89,775 francs. Tel est son déficit.

Quant à l'actif, il existe; mais il ne saurait être évalué aussi exactement. Il consiste dans les droits d'auteur de quatre pièces, dont les représentations furent arrêtées en plein succès, au moment où l'écrivain fut condamné par le jury criminel. Ces pièces sont : L'Eventail de Mme Windermere, Une femme sans importance, Un mari idéal, et l"Importance qu'il ya a être sérieux. Deux de ces pièces sont jouées actuellement à l'étranger, et les autres seront reprises cet hiver à Londres même. En peu de mois, les droits d'auteur produiront assez d'argent pour le paiement intégral de tous les créanciers. Il n'est pas même indispensable que tous les créanciers soient payés pour éviter au condamné la déclaration de banqueroute.

Le principal créancier de Wilde est un de ses amis, lequel lui a prêté une somme de 63,000 fr. Celui-ci consent à attendre indéfiniment. Restent dus, immédiatement exigés : 26,778 francs. Sur cette somme, les frais de justice figurent pour 20,528 francs, avances fournies par lord Queensberry à l'occasion du procès que lui intenta Wilde. Lord Queensberry réclame ce remboursement sur l'heure, et c'est lui, également, qui a provoqué cette action, en banqueroute.

Le reste des sommes dues, soit 6,250fr., est réclamé par divers fournisseurs : un marchand de vins, un marchand de tabac, deux bijoutiers, trois fleuristes, un cocher, Au total, sur un passif de près de 90,000 fr., les créanciers exigeants représentent seulement 25,000 et quelques cents francs. Les droits d'auteur combleront ce passif avant peu.

Il y a mieux. Dès maintenant, quelques amis de Wilde se réunissent en vue de lui fournir au plus tôt 25,000 fr. Le déficit se réduira donc à 1,778 fr. Ce n'est point pour une dette aussi médiocre que la cour prononcera la banqueroute à charged'un débiteur déjà rudement accablé et rendu insolvable uniquement par les circonstances. Je demande donc la remise à six semaines. D'ici là, nous aurons réglé nos affaires.

M. Giffard, juge, faisant droit à ces conclusions, renvoie l'affaire au 5 novembre prochain.

Pour permettre à Oscar Wilde de regagner la voiture cellulaire qui l'a ramené directement au chemin de fer, il a fallu disperser une foule énorme de curieux amassée aux environs de la cour des banqueroutes.

AMÉDÉE BLONDEAU.

L'Univers - Friday, September 27, 1895

Oscar Wilde transporté lundi de la prison de Wandswortb à Newgate où il passa la nuit, fut conduit mardi matin à Cancy Street où il fut gardé à vue en attendant sa comparution au sujet de la demande en faillite déposée oontre lui.

L'avocat a demandé l'ajournement du débat assurant que le condamné est solvable.

Quatre pièces, dit-il, furent arrêtées en plein succès, au moment où l'écrivain fut condamné par le jury criminel.

Ces pièces sont : l'Eventail de Mme Wendermere, Une femme sans importance, Un mari idéal et l 'Importance qu'il y a à être sérieux. Deux de ces pièces sont jouées actuellement à l'étranger, et les autres seront reprises cet hiver à Londres même. En peu de mois, les droits d'auteur produiront assez d'argent pour le payement intégral de tous lés créanciers. Il n'est même pas indispensable que tous les créanciers soient payés paur éviter au condamné la déclaration de banqueroute. Le principal créan cier de Wilde est un de ses amis, lequel lui a prêté une somme de 63,000 francs. Celui-ci consent à attendre indéfiniment. Restent dus, immédiatement exigés : 26,778 francs. Sur cette somme les frais de justice figurent pour 20,528 francs, avances fournies par lord Queensberry à l'occasion du procès que lui intenta Wilde.

Lord Queensberry réclame ce remboursement sur l'heure et c'est lui, également, qui a provoqué cette action en banqueroute. Le reste des sommes dues, soit 6,250 francs, est réclamé par divers fournisseurs : un marchand de vin, un marchand de tabac, deux bijoutiers, trois fleuristes, un cocher. Au total, sur un passif de près de 90,000 francs, les créanciers exigeants représentent seulement 26,000 et quelques cents francs. Les droits d'auteur combleront ce passif avant peu.

Il y a mieux. Dès maintenant; quelques amis de Wilde se réunissent en vue de lui fournir au plus tôt 25,000 francs. Le déficit se réduira donc à 1,778 francs ! Ce n'est point pour une dette aussi mediocre que la cour prononcera la banqueroute à charge d'un débiteur déjà rude ment accablé et rendu insolvable uniquement par les circonstances. Je demande donc la remise à six semaines. D'ici là, nous aurons réglé nos affaires.

Le juge Giffard se rendant à ces raisons a ajourné le débat au 5 novembre.

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