Previous report Le Signal - Monday, April 8, 1895
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LES PURS

Enfin voici la Dépêche, un des principaux organes des épurateurs, des purs.

M. Maret y a publié un article sur Oscar Wilde, le hideux condamné au Hard Labour.

M. Maret trouve que ce supplice est barbare (ce qui peut être vrai), et il en conclut que ce qui fait la corruption, ce sont les lois. « Plus un peuple a de lois, plus il est corrompu. Plus il punit de choses, plus il y a chez lui de choses punissables ». Les Anglais punissent cruellement les vices contre nature ; c’est donc que les vices contre nature sont très communs chez eux.

Le fond de cette admirable théorie paraît être que si on abolissait les lois, il n’y aurait plus de délits, et que le meilleur moyen de supprimer le mal, ce serait de supprimer le bien. Quand il n’y aurait plus de soleil, en effet, il n’y aurait plus d’ombre.

Et il semble bien que pour l’honorable M. Maret le crépuscule commence à tomber : il ne distingue plus des objets gros comme les énormités Oscar Wilde. La liberté du vice contre nature lui paraît une liberté comme une autre, et les Anglais lui semblent aussi bêtes que M. Bérenger.

Et il continue : « Il ne s’agit pas même d’assassins, mais de simples accusés de pratiques vicieuses. Certes je n’ai aucune sympathie pour eux, mais je les estime bien plus, tels qu’ils sont, que leurs misérables persécuteurs. »

Oscar Wilde : pauvre victime, à laquelle on peut tout simplement reprocher « des goûts blâmables ». Et pour celte vétille qu’il suffirait de « signaler », on va tuer son talent littéraire, s’il en a réellement ! Voilà « l’idiote sauvagerie ».

Tels sont les purs.

Peut-être la morale pourrait-elle être défendue contre ceux qui l’attaquent. Mais que peut-elle contre ceux qui la défendent ainsi ?

C’est toujours la vieille histoire. Je me charge de mes ennemis ; mais qui se chargera de mes amis ?

E. Doumergue.

THE PURE

Finally here is the Dispatch, one of the main organs of the purifiers, of the pure.

Mr. Maret published an article there on Oscar Wilde, the hideous convict of Hard Labour.

M. Maret finds this torture barbarous (which may be true), and he concludes that what causes corruption are the laws. “The more laws a people have, the more corrupt it is. The more things he punishes, the more punishable things there are in him”. The English cruelly punish vices against nature; it is therefore that unnatural vices are very common among them.

The basis of this admirable theory seems to be that if the laws were abolished, there would be no more offences, and that the best means of suppressing the evil would be to suppress the good. When there would be no more sun, indeed, there would be no more shade.

And it seems that for the honorable M. Maret dusk is beginning to fall: he can no longer distinguish objects as big as the Oscar Wilde enormities. Freedom from unnatural vice seems to him a freedom like any other, and the English seem to him as stupid as M. Bérenger.

And he continues: “It is not even a question of assassins, but simply accused of vicious practices. Certainly I have no sympathy for them, but I esteem them much more, such as they are, than their miserable persecutors. »

Oscar Wilde: poor victim, who can simply be blamed for “blameable tastes”. And for this trifle that it would be enough to "point out", we will kill his literary talent, if he really has any! This is "idiot savagery".

Such are the pure.

Perhaps morality could be defended against those who attack it. But what can she do against those who defend her thus?

It's always the old story. I take care of my enemies; but who will look after my friends?

E. Doumergue.

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