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Original paragraph in
L'Echo de Paris - Saturday, June 15, 1895
L'Echo de Paris - Saturday, June 15, 1895
Most similar paragraph from
L’Éclair - Friday, June 14, 1895
L’Éclair - Friday, June 14, 1895
Difference
Dans l'un de mes derniers articles, je m'élevai contre la condamnation du hard labour infligée à Oscar Wilde et j'indiquai la férocité
de la peine qui est un outrage à l'humanité indigne d'une nation civilisée. Ma protestation concordait avec le mouvement de l'opinion publique en France ;
aussi a-t-elle été entendue ici-et de l'autre côté du détroit. Les témoignages d'approbation me sont venus nombreux et je les accueillis avec la joie
fière de servir une cause humaine.
Mais il est advenu qu'on a nié l'odieux traitement dont souffre le prisonnier de Pentonville. Jamais les tortionnairees légaux n'ont le
courage de leurs méfaits ; toujours la justice a honte d'elle-même. C'est ainsi qu'on voulut détourner l'attention de la géhenne d'Oscar Wilde en
représentant comme une légende le supplice du hard labour. On eut la naïveté d'interroger le geôlier sur le service de la geôle et naturellement il
qualifia de « cruelles niaiseries » le récit des tourments. La plupart des quotidiens anglais, plusieurs journaux français à leur suite, accueillirent
avec trop de complaisance les facéties du garde chiourme.
Or le correspondant du Gaulois à Londres rendit visite avant-hier à l'un des maîtres du barreau anglais, le propre défenseur du
prisonnier, sir Edward Clarke, solicitor général dans le précédent cabinet de Lord Salisbury.
Le grand avocat, qui est l'un des premiers jurisconsultes de l'Angleterre donne à notre confrère les renseignementd suivants, qui
précisent sinistrement le sort de l'infortuné Wilde :
Mon opinion est qu'Oscar Wilde fera toute sa peine. Il a subi la condamnation la plus sévère qui pût lui être infligée. Vous n'avez
point idée de l'extrême sévérité de cette peine. Le hard labour, dont la traduction littérale en français est : travail dur, comprend un régime implacable
dans son absorbante régularité et ses exigences.
Oscar Wilde, dont les cheveux, les longs cheveux d'esthéte, ont été coupés ras, est vêtu d'un costume de toile à voile marqué d'une
flèche, ce qu'on appelle un broad arrow, signe distinctif des convicts. Sa cellule, très étroite, a pour tout meuble un lit ou pour mieux dire une planche
reposant sur quatre pied et sur laquelle on a placé une couverture. Il n'y a pas de matelas et l'oreiller est en bois. A quelques pas de là, un
escabeau.
Oscar Wilde est soumis à trois sortes de travaux. D'abord, dans sa chambre il doit procéder, pendant un certain nombre d'heures, assis
sur son escabeau, à la réduction en tout petits morceaux, d'énormes cordes goudronnées, de ces cordes dont on se sert pour amarrer les navires. Il fait ce
travail â l'aide d'un clou — et de ses ongles. Travail pénible, atroce, fait pour déchirer, abîmer irrémédiablement les mains.
Oscar Wilde est soumis à trois sortes de travaux. D’abord dans sa chambre il doit procéder, pendant un certain nombre d'heures, assis sur
son escableau, à la réduction en tout petits morceaux, d’énormes cordes goudronnées, de ces cordes dont on se sert pour amarrer les navires.
Puis on le conduit dans une cour où il déplace un certain nombre de boulets de canon, les transportant un à un d'un endroit à un autre
et les plaçant en des tas symétriques. Le travail n'est pas plutôt achevé qu'il est détruit par Wilde lui-meme et le prisonnier est obligé de reporter les
boulets à l'endroit primitif, un à un.
Enfin il est soumis à la peine du tread mill, la plus dure de toutes. Figurez-vous une immense roue à l'intérieur de laquelle se
trouvent des marches circulaires. Oscar Wilde, placé sur une des marches, fait mouvoir aussitôt la roue à l'aide de ses pieds. Les marches se succèdent
ainsi sous ses pieds dans une évolution rapide et régulière. Ses jambes sont soumises par là à un mouvement précipité qui devient une fatigue énervante,
affolante au bout de quelques minutes. Mais il doit maîtriser cette fatigue, cet énervement, cette souffrance, et continuer à jouer des jambes, sous peine
d'être renversé par l'action même de la roue, enlevé et projeté. Cet exercice fantastique dure un quart d'heure. On donne à Wilde cinq minutes de repos,
puis l'exercice recommence.
Il est toujours seul et ne peut parler à son geôlier qu'à certains moments. Toute correspondance lui est interdite et toute lecture,
sauf celle d'une bible et d'un livre de prières placés à la tête de la planche qui lui sert de lit. On pense que ses parents ne serent admis à le voir
qu'à la fin de l'année.
Il est toujours seul et ne peut parler à son geôlier qu’à certains moments. Toute correspondance lui est interdite, et toute lecture,
sauf celle d'une bible et d’un livre de prières placés à la tète de la planche qui lui sert de lit.
Comme nourriture, on lui sert de la viande et du pain noir. Il ne boit que de l'eau, naturellement. Les repas sont à heure fixe, car
il est de toute importance qu'il suive un régime régulier pour accomplir les travaux si durs auxquels il est soumis tous les jours.
Comme nourriture, on lui sort de la viande et du pain noir. Il ne boit que de l’eau, naturellement. Les repas sont à heure fixé, car il
est de toute importance qu’il suive un régime, régulier pour accomplir ces travaux si durs auxquels il est soumis tous les jours.
Comme vous voyez, poursuit l'éminent avocat, la hard labour est d'une sévérité particulière. Beaucoup de convicts, dans le cas d'Oscar
Wilde, ont dit, en sortant de prison, qu'ils eussent préféré dix ans de servitude pénale à ces deux années de hard labour. La souffrance morale égale la
souffrance physique. Je vous le répète, c'est la peine la plus sévère dont notre loi dispose.
Cette longue citation établit irréfragablement la vérité : telle est la parole d'un homme à qui sa haute situation, son autorité
considérable interdisent d'altérer ou d'aggraver les faits. Il faut qu'ils soient reproduits par tous les journaux, connus de l'Europe, de tout le monde
civilisé. On y découvrira l'âme de l'Angleterre, de ce peuple qui se réclame d'un libéralisme menteur en jugeant les autres nations, alors que chez soi il
tranche par la torture les questions de morale et applaudit à l'application de lois qui seraient les plus grotesques des vieilleries si elles ne
comportaient pas une monstrueuse férocité.